Actes n°4 / Doctorales 58 : L'épreuve de l'altérité

L'apatrie du sujet : inquiétante étrangeté

Alexandre Faure
L'apatrie du sujet : inquiétante étrangeté

Résumé

Partant de l’esthétique et de la linguistique, Sigmund Freud conduit une réflexion sur l’épreuve que constitue la rencontre de l’altérité par l’abord du concept d’Unheimlich. Là où très vite le on-dit du discours courant pourrait supposer que l’étranger qui inquiète est à situer au champ de l’autre, à l’extérieur, Freud déconstruit cette opinion pour le situer au cœur même du sujet. Au travers d’une lecture psychanalytique, cet article tente de rendre saillant combien la recherche de l’altérité au lieu de l’autre, dans cet ailleurs surtout pas chez soi, ramène foncièrement à celle qui gît en nous. L’abord psychanalytique, inspiré de la relecture de Jacques Lacan, nous conduit à entendre l’altérité non pas comme conception du dehors, mais comme pensée du dedans. Il s’agira donc d’en dégager les enjeux lorsque ce point d’intimité extérieure sera aperçu ou rencontré.

Mots-clés : Unheimlich, patrie, langage, habitat, épreuve, altérité, psychanalyse

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Exil, tout est dit dans ses racines. Qu’il vienne de essil, signifiant ravage, destruction… ou de ex-solo, hors du sol, arraché du sol, il s’agit d’un état, d’un mouvement de séparation d’avec son espace vital. Mais pas n’importe lequel. Cet espace est la terre d’origine, où je suis né […][1]

Atiq Rahimi

Introduction

Je me suis longtemps interrogé sur ce qui, de la psychanalyse, pouvait être entendu du thème de ce colloque de l’École Doctorale 58 intitulé « L’épreuve de l’altérité ». Cette écriture est portée par l’intérêt d’articuler une pensée de l’altérité à la construction analytique ; non comme conception du dehors, mais comme pensée du dedans. L’expérience de la vie de tous les jours, proche d’une phénoménologie du quotidien, permet de rendre saillant combien la recherche de l’altérité au lieu de l’autre reconduit foncièrement à la sienne propre. Voici l’un des sens que cet article propose de mettre à l’épreuve.

L’abord pluridisciplinaire de cette question de l’altérité — en tant qu’elle s’éprouve — nécessite une opération visant à délimiter ce qui est en jeu et à la question, afin d’éclaircir notre position épistémologique. Par conséquent, toute démarche visant à l’élaboration d’un savoir théorique conduit d’abord à se rejoindre autour des signifiants et concepts qui sont en tension. Prenons l’exemple du signifiant « altérité ». Ce dernier ne possède pas d’entrée dans les principaux dictionnaires de la psychanalyse (Dictionnaire international de la psychanalyse d’Alain de Mijolla, ou Vocabulaire de la psychanalyse de Jean Laplanche et Jean-Baptiste Pontalis) et ne trouve son répondant dans la théorie psychanalytique qu’au travers d’un retour à son étymologie latine, alter, signifiant l’autre. Soulignons aussi que l’étymon met en jeu la question du deux[2], le second, le différenciant du latin classique alius signifiant un autre, de manière indéfinie. L’altérité pour la psychanalyse c’est le champ de l’Autre. Nous reviendrons plus loin sur cette distinction centrale dans la théorie psychanalytique de l’autre et de l’Autre. D’ores et déjà, nous pouvons avancer que la psychanalyse lacanienne postule, au travers de cette disjonction, que l’altérité n’est pas une situation d’intersubjectivité, mais davantage vécue comme un rapport à l’Autre.

Dans « Les clefs de la psychanalyse », Jacques Lacan — psychiatre et psychanalyste du XXe siècle, relecteur de l’œuvre de Freud — dit : « Eh bien ! La psychanalyse vous annonce que vous n’êtes plus le centre de vous-même, car il y avait en vous un autre sujet, l’inconscient[3]. » Cette citation se doit d’être mise en lumière par ce que Freud nomme « la vexation psychologique[4] », dont il parle dans son texte Une difficulté de la psychanalyse paru en 1917. Ceci venant déloger le sujet d’une posture maîtresse, indiquant déjà la portée subversive du savoir analytique en tant qu’il renverse les conceptions classiques. Cette humiliation d’ordre psychologique découle du célèbre aphorisme freudien, « […] le moi n’est pas maître dans sa propre maison[5] ». L’homme se sentant souverain en sa demeure, des hôtes étrangers peuvent faire irruption et se manifester. L’apport freudien est ainsi à situer du côté d’une nomination logique de ce qui a toujours insisté au cœur même du sujet. C’est ce qu’il épinglera du signifiant « inconscient » qui, dans son sens strict, est du domaine de l’insu, de ce qui échappe à la conscience. En ce sens, c’est une hypothèse logique qui s’articule autour de motions qui insistent à l’intérieur même de la vie psychique du sujet et non pas de l’ordre d’une effraction causée par des éléments venant du dehors. Ces tendances, ces évènements qui se soustraient à notre conscience, s’opposent au moi souverain. Il en résulte ce qui se nomme le symptôme entendu comme arrangement entre des pulsions inconscientes qui veulent s’assouvir et le petit maître moi qui les réfrène. Cette manifestation symptomatique est souvent vécue par le sujet comme l’expérience de sa propre étrangeté. « Quel est cet autre qui parle dans le sujet, et dont le sujet n’est ni le maître, ni le semblable, quel est l’autre qui parle en lui[6] ? » se demande Jacques Lacan.

Nous voilà donc engagés dans ce qui vient redoubler le décentrement copernicien, à savoir le déracinement freudien : si la Terre n’est plus le centre du cosmos, l’homme n’habite pas non plus seul en sa demeure, le forçant à la cohabitation. Évidemment, la découverte freudienne est plutôt une redécouverte en ce sens qu’elle n’est pas de l’ordre d’une création ex-nihilo, mais bien plus d’une nomination qu’il fait fonctionner comme structure logique et comme poussée structurée à l’insu du sujet. Ainsi, l’inconscient peut être entendu comme une hétérotopie inquiétante venant troubler l’assise moïque du narcissisme et de l’amour propre de l’humanité. Isolons donc — à partir de ce que Freud dégage dans son texte écrit en 1919, Das Unheimliche —, comment se rencontre, voire s’éprouve cette altérité ? Brièvement, l’intérêt de Freud pour cette dimension de « l’inquiétant » remonte à l’année 1913, dont on trouve les premières références dans son texte Totem et tabou. Das Unheimeliche est une étude triptyque qui commence par un passage en revue les différentes traductions et déclinaisons langagières du terme Heimlich, pour entendre ce qui est en jeu dans la langue. Dans un second temps, Freud opte pour un abord phénoménologique de l’inquiétant et s’appuie, entre autres, sur Les contes d’Hoffmann. Enfin, il termine en situant ce nouveau concept dans le champ psychanalytique tout en l’articulant aux différentes instances déjà présentes. Ceci nécessitera donc de déplier les différents concepts abordés au travers d’un frayage dans les enseignements de Freud et de Lacan ; frayage en tant qu’il « […] consiste à ouvrir une voie en forçant des obstacles dans un domaine qui résiste à la pensée ou à la marche[7] ».

1. Prélude

Depuis Freud, la psychanalyse considère que les rapports humains ne font que très rarement abstraction de l’épreuve de l’autre et qu’il n’y a pas de sujet sans autre[8]. Subséquemment, il nous faut opérer une seconde distinction épistémologique, à savoir le dédoublement et la division du concept d’autre.

« Le premier, l’autre avec un petit a, est l’autre imaginaire, l’altérité en miroir qui nous fait dépendre de la forme de notre semblable. Le second, l’Autre absolu, est celui auquel nous nous adressons au-delà de ce semblable, celui que nous sommes forcés d’admettre au-delà de la relation du mirage, celui qui accepte ou qui se refuse en face de nous, celui qui, à l’occasion nous trompe, dont nous ne pouvons jamais savoir s’il ne nous trompe pas, celui auquel nous nous adressons toujours. Son existence est telle que le fait de s’adresser à lui, d’avoir avec lui comme un langage, est plus important que tout ce qui peut être un enjeu entre lui et nous[9]. »

Par conséquent, il y a l’autre en tant qu’imaginaire et support du jeu identificatoire, et il y a celui qui de sa majuscule indique, non pas un sujet[10] incarné, mais l’antécédence d’un lieu : celui du symbolique, celui de la loi, celui du langage. Au premier plan de la psychanalyse, se trouve ainsi ce rapport de l’homme au langage, au grand Autre. Dès lors, le sujet est soumis à une épreuve[11], celle du langage qui intervient comme troisième terme entre le sujet et l’autre. « La psychanalyse devrait être la science du langage habité par le sujet. Dans la perspective freudienne, l’homme, c’est le sujet pris et torturé par le langage[12]. » Cette citation nous permet de revenir sur le rapport de Freud et de Lacan. Si nous avons pu indiquer précédemment que Lacan opère un retour à Freud par le truchement de la lecture de ses écrits, il radicalise également ce que le père de la psychanalyse n’avait fait que suggérer, à savoir l’hypothèse du langage. Si Freud ne s’en servait que comme voie d’accès aux processus inconscients — la cure par la parole qu’il met en pratique avec les hystériques —, Lacan va au-delà en postulant que le sujet est l’effet du signifiant. À partir de là, c’est l’appui structuraliste qui conduit au développement des thèses des structures langagières et à l’abord différentiel de la psychopathologie.

2. L’épreuve en psychanalyse ?

Commençons pour l’instant par déplier le premier terme du titre de ce colloque en restant attentif au signifiant pour entendre ce qui de « l’épreuve », s’énonce. Un retour à l’étymologie permet d’entendre dans periculum, la notion associée au danger, au risque et dans experimentum la question de la marque. Dans un premier temps l’épreuve s’entend donc du côté d’un risque encouru pour celui qui l’éprouve et qui n’est pas sans laisser de trace.

Dans un second temps et au-delà de l’étymon, nous trouvons dans son acception classique du domaine photographique, une dimension supplémentaire. On parle effectivement d’épreuve ou de tirage original. Une photographie argentique est toujours imprimée, tirée d’après un film négatif et on la nomme « épreuve originale ». Les techniques photographiques distinguent deux types d’épreuves originales en fonction du délai qui s’écoule entre la prise de vue et la date du tirage. Le tirage contemporain à la prise de vue est dit d’époque ou vintage, et celui qui est fait dans une temporalité plus éloignée est dit postérieur. Pour ce propos, c’est l’épreuve originale postérieure que nous retenons, en tant qu’elle introduit la dimension de l’après coup. Mais après quoi ?

C’est à partir du négatif, de cette première impression de l’image — inversée par rapport à l’image d’origine — que se développe l’épreuve postérieure. Pour illustrer ce que ce détour par la photographie classique permet d’entendre, prenons l’exemple de l’infans. L’infans est un concept psychanalytique permettant de nommer et de différencier l’enfant avant qu’il ne parle et qu’il ne prenne la parole. L’infans, c’est cet être qui « […] est déjà, de bout en bout, cerné dans ce hamac du langage qui le reçoit et en même temps l’emprisonne[13] », dit Lacan. Il est nécessaire d’entendre combien le langage, pour Lacan, est antérieur à la chute du petit d’homme dans le monde. Aussi, il est déjà marqué d’un certain point d’accommodation dans le champ du langage, dans le champ de l’Autre. De cette première marque, le sujet en fera l’épreuve au détour de sa vie et de ses contingences.

Mais soyons clair, il n’existe aucun moyen de saisir le moment où cette photo a été prise. Quoi qu’il en soit comme le disait Winnicott, « Un bébé, seul, ça n’existe pas[14] ». Ça n’existe pas en tant qu’il y a toujours l’Autre du langage pour l’accueillir — ne le laissant donc pas seul. L’infans arrive dans une matrice langagière, toujours déjà là : c’est l’antécédence de l’Autre. Il est ainsi parlé avant d’être parlant. Au moment où il naît, et quitte le ventre maternel — cette antique et mythique terre natale — il est contraint, par l’antériorité de l’Autre, à un asile langagier. Voici donc le nouveau-né exilé de la terre natale, privé de sa patrie. Nous y reviendrons. Afin de mesurer le poids et l’importance du langage chez l’enfant, — puisque de l’enfance on en fait tout un discours —Lacan prend appui sur l’exemple du dit apprentissage et plus précisément de l’apologue de l’enfant qui se brûle.

« Il [l’enfant] met son doigt sur le poêle, il se brûle. A partir de là, prétend-on, à partir de sa rencontre avec le chaud et le froid, avec le danger, il ne lui reste qu’à déduire, à échafauder la totalité de la civilisation… C’est une absurdité : à partir du fait qu’il se brûle, il est mis en face de quelque chose de beaucoup plus important que la découverte du chaud et du froid. En effet, qu’il se brûle et il se trouve toujours quelqu’un pour lui faire, là-dessus, tout un discours. L’enfant a beaucoup plus d’effort à faire pour entrer dans ce discours dont on le submerge, que pour s’habituer à éviter le poêle. En d’autres termes, l’homme qui naît à l’existence a d’abord affaire au langage ; c’est une donnée[15]. »

3. Das Unheimliche ou l’inquiétante étrangeté[16]

Dans Das Unheimliche, et après un travail linguistique et phénoménologique autour de la notion d’étrangeté, Freud revient sur une anecdote personnelle. Il est seul dans un compartiment du train. À la suite d’une secousse qui ouvrit la porte qui conduisait au cabinet de toilette voisin, « un monsieur d’un certain âge en robe de chambre, le bonnet de voyage sur la tête, entra chez moi[17] ». Freud suppose que cet homme est entré dans sa cabine du train par erreur. Suite à cela, il se précipite vers ce monsieur pour l’alerter de son étourderie. Mais dans son mouvement, quelque chose l’arrête : « je reconnus bientôt, abasourdi, que l’intrus était ma propre image renvoyée par le miroir de la porte de communication. Je sais encore que cette apparition m’avait été foncièrement désagréable[18]. » Ce dont Freud témoigne ici est un élément central, clé qui permet d’entrevoir cette dimension de la rencontre de l’altérité en soi, ce moment de suspens, de suspension où le moi n’est pas reconnu par le je.

Unheimlich est ainsi le concept freudien qui épingle ces situations d’étrangeté au prix d’un affect « foncièrement désagréable ». D’un point de vue linguistique, le Heim allemand c’est le foyer, l’apprivoisé, l’intime, le caché, le confidentiel. Heimlich est l’adjectif, donc ce qui fait partie du foyer. Retenons l’idée de l’animal dit domestique, habitué, apprivoisé lorsqu’il est dit Heimlich — n’empêchant pas pour autant le retour de son animalité. Un c’est le préfixe qui exprime la négation, le contraire. Donc c’est ce qui n’est pas familier. Ce qui est connu, familier, me devient invisible. Pensons ici à nos petites habitudes qui, si on les retire, dévoilent ce qui était devenu familier, et nous expose à l’étrangeté de la nouveauté, à l’inhabituel. L’inquiétante étrangeté serait ce point tellement intime devenu inconnu, étrangement étranger. Ainsi l’on entend combien le spectre de l’inquiétante étrangeté, l’épreuve de ce qui nous est étranger, fait coïncider le point le plus intime de nous-même à celui le plus étranger. Cet intime extérieur brouille la dialectique classique du dedans-dehors.

Dans la première section de Das Unheimliche, Freud souligne ce que note Schelling : « Serait Unheimlich tout ce qui devait rester un secret [Geheimnis], rester dans le monde du caché, et qui est venu au jour[19]. » Il y a cette dimension de surprise, de rencontre du sujet avec quelque chose qui lui est devenu autre et qui pourtant lui est familier, et pour Freud en l’occurrence son propre corps, l’image de son corps empreinte d’un point d’extériorité. Autrement dit, il y a un manque dans l’image qui ne permet pas sa reconnaissance. Ce que l’anecdote freudienne enseigne c’est que si justement on pourrait supposer que l’inquiétante étrangeté, l’étranger qui inquiète serait à situer au champ de l’autre, à l’extérieur, Freud opère une déconstruction de cette opinion pour le localiser au cœur même du sujet. « Je révélerai d’emblée que les deux voies [linguistique et phénoménologique] conduisent au même résultat, à savoir que l’inquiétant est précisément ce mode de l’effroyable qui remonte à l’anciennement connu, au depuis longtemps familier[20]. » Le philosophe contemporain Guillaume Le Blanc propose que « Soi-même comme étranger reste toujours une éventualité […] Étranger, « je » suis donc toujours amené à pouvoir l’être[21] ».

À partir de l’expérience, il se déduit et se transcrit dans le langage courant que Heimlich passe à son contraire Unheimlich, « […] car cet Unheimlich n’est effectivement rien de nouveau ni d’étranger, mais quelque chose qui est pour la vie d’âme de tout temps familier, et qui ne lui a été rendu étranger que par le procès du refoulement[22] ». Ceci permet à Freud de dire que le préfixe « un » dans ce mot est « la marque du refoulement[23] ».

Verdrängung, le refoulement, est l’une des pierres angulaires de l’édifice analytique en tant qu’il serait l’opération à l’origine de la structuration de l’inconscient. « Nous donnerons le nom de refoulement au processus pathogène qui se manifeste à nous par l’intermédiaire d’une résistance[24]. » Succinctement, ce processus consiste en ce que les tendances psychiques inconscientes n’accèdent pas au préconscient et au salon de la conscience. Il s’entend dans le fait d’être refoulé de quelque part, la notion de ne pouvoir y entrer, de rester au dehors et de ne pouvoir participer à la fête, à la satisfaction. Enfin, pour la psychanalyse la notion de refoulement ne va pas sans celle de retour du refoulé, c’est-à-dire que le mécanisme de refoulement peut conduire à des conséquences qui se perçoivent sous forme de rêves, de lapsus, d’actes manqués, etc.

Dans la suite de ce développement et à l’aide des considérations précédentes, comment entendre cette trace laissée, cette « marque du refoulement » ? Pour terminer la seconde section de Das Unheimliche, Freud fait cas d’une observation clinique : « Il arrive souvent que des hommes névrosés déclarent que l’organe génital féminin est pour eux quelque chose d’inquiétant. Or cet inquiétant est ce qui donne accès à l’ancien pays natal (Heimat) de l’enfant des hommes, à ce lieu-là dans lequel chacun a séjourné une fois et d’abord[25]. » Ce corps maternel qui, au début, était Heimlich, subit la marque du refoulement pour devenir inquiétant. Quelque chose est donc fondamentalement oublié, et l’inquiétant étrange, le Unheimlich peut être ainsi pensé comme le retour du refoulé de ce qui était Heimlich, touchant un point intime du sujet, proche de sa vérité de jouissance. De la jouissance, Freud n’en a pas fait un concept, bien qu’il l’ait abordé. C’est ce que l’on peut nommer un apport lacanien pour épingler l’au-delà du principe du plaisir freudien, pour s’emparer de la dimension de l’excès, du trop de plaisir. La jouissance c’est ce qui dépasse la limite. En deçà de la limite, c’est le champ du plaisir.

Par conséquent, nous pouvons opérer une distinction, une limite entre l’épreuve de la réalité matérielle et l’épreuve de l’altérité. « La plus remarquable conjoncture du souhait et de l’accomplissement, la répétition la plus énigmatique d’expériences vécues analogues au même lieu ou à la même date, les perceptions visuelles les plus génératrices d’illusions et les bruits les plus suspects ne l’égareront pas, n’éveilleront en lui aucune angoisse qu’on puisse qualifier d’angoisse devant « l’inquiétant ». Ici il s’agit donc purement d’une affaire d’examen [d’épreuve] de réalité, d’une question de réalité matérielle[26]. » Freud dégage ici la dimension de ce qui est inquiétant, d’une simple rencontre d’avec l’extérieur, pour radicaliser l’inquiétante étrangeté du côté d’une rencontre toujours manquée avec quelque chose qui concerne le sujet et l’excède. Cette épreuve de l’altérité s’éclaire de l’anecdote freudienne exposée plus haut. Quelqu’un est entré chez lui et a fait effraction.

4. Heidegger : l’homme, le langage et l’habitat

Le frayage freudien conduit à localiser l’antique patrie du sujet comme fondamentalement perdue et à la dialectiser avec le sentiment d’inquiétante étrangeté. Ouvrons maintenant le débat à la philosophie et plus précisément à celle d’Heidegger en tant qu’elle fait support à l’élaboration lacanienne de l’habitat, et plus précisément celle de l’habitat langagier. À l’instar de Latone montrant la fuite, contrainte à l’exil, le sujet exilé de son antique patrie que constitue le corps maternel, devra trouver son Délos. L’hypothèse que soutient la psychanalyse lacanienne, à l’appui des considérations d’Heidegger, est que cette terre d’asile n’est autre que le langage lui-même. Heidegger souligne, dans Essais et conférences, plus précisément dans « Bâtir, habiter, penser », la présence d’un oubli fondamental à la condition humaine. « L’homme se comporte comme s’il était le créateur et le maître du langage, alors que c’est celui-ci [le langage] qui le régente. Peut-être est-ce avant toute autre chose le renversement opéré par l’homme de ce rapport de souveraineté qui pousse son être vers ce qui lui est étranger[27]. » L’homme, pour éviter de se savoir subordonné aux effets du langage et de rencontrer ce qui lui est le plus intimement et originellement étranger, va rencontrer l’étranger au dehors. Ce contournement ontologique met en lumière ce penchant subjectif qui consiste à diriger son être vers la chose extérieure pour ne pas se confronter à ce qu’il tente d’oublier, à savoir qu’il est employé du langage. Du reste, et l’expérience en atteste, localiser l’altérité à l’extérieur n’est pas sans susciter une série d’affects que nous lui connaissons et qu’il conviendrait de réinterroger aujourd’hui — haine, envie, jalousie, peur, angoisse.

Tout comme Freud, au moins du point de vue de la logique, Heidegger fait avancer sa réflexion dans « Bâtir, habiter, penser », autour d’une étude linguistique et dialectique. Il part de ce que veut dire « bâtir », qui vient du haut-allemand buan signifiant habiter. L’étude du mot le conduit à ce que bâtir réponde de la question de l’être en ce que bauen, buan partage la même racine que le bin, du « je suis », ich bin. « La façon dont tu es et dont je suis, la manière dont nous autres hommes sommes sur terre est le buan, l’habitation[28]. » L’homme est pour autant qu’il habite. Si en son temps, la question de l’habitat était déjà centrale — mais ne l’a-t-elle jamais été ? — elle l’est tout autant aujourd’hui dans notre quotidien. À la différence peut-être que dans l’expérience que nous en faisons aujourd’hui, l’habiter est devenu une « habitude », quelque chose (Un)Heimlich faisant que l’homme n’y attache presque plus d’importance. Ceci est une constatation clinique qui découle de ces émissions qui fleurissent où l’habitat de l’autre est à découvrir. Préférant ne pas s’interroger sur notre propre mode d’habitat, notre attention se tourne vers la maison des autres. C’est ce sur quoi Lacan met le doigt en pointant l’ignorance de son habitat par la nature de l’habitude et en ce que l’habitude fait masque. Soulignons d’ailleurs que les mots habitat et habitude sont tous deux des fréquentatifs de habere, avoir en latin. « Comme on le sait, l’homme habite et, s’il ne sait pas où, n’en a pas moins l’habitude[29]. » dit Lacan. Il s’entrevoit donc ce rapport à l’avoir — avoir un logement, dans lequel ne se réduit pas la question de l’habiter — en ce qu’il pare l’être.

Heidegger considère à la fin de son article que la véritable crise de l’habitation ne consiste pas dans le manque de logement. « La vraie crise de l’habitation, d’ailleurs, remonte dans le passé plus haut que les guerres mondiales et que les destructions, plus haut que l’accroissement de la population terrestre et que la situation de l’ouvrier d’industrie [auxquelles s’ajoutent aujourd’hui les nombreux déplacements de populations]. La vraie crise de l’habitation réside en ceci que les mortels en sont toujours à chercher l’être de l’habitation et qu’il leur faut d’abord apprendre à habiter[30]. » Il poursuit : « Dès que l’homme, toutefois, considère le déracinement, celui-ci déjà n’est plus une misère. Justement considéré et bien retenu, il est le seul appel qui invite les mortels à habiter. » En suivant Heidegger, le déracinement du sujet est donc le seul appel qui l’invite à habiter. Mais de quel déracinement parle-t-il ? Heimatlosigkeit, le déracinement, l’exil serait-ce la condition de l’habitation ? Du reste, le dialogue de la philosophie et de la psychanalyse ne pourrait-il pas conduire à la question suivante : est-il possible de définir l’être du sujet sans se questionner sur la nature de son habitation ? L’apatridie structurale du sujet, dont il ne veut rien savoir, s’énonce de cette coupure lacanienne ; coupure qui est la marque d’un voyage sans retour dans le monde du langage. La prise de position qui suit, de la part de Lacan quant à la naissance, est à entendre dans le contexte de l’époque où prospérait une abondante littérature situant la séparation en jeu à la naissance entre la mère et l’enfant, support du fantasme d’une unicité originelle perdue.

« à la naissance […] la coupure est ailleurs que là où nous la mettons. Par conséquent, elle n’est pas conditionnée par l’agression portée sur le corps maternel, mais est intérieure à l’unité individuelle primordiale telle qu’elle se présente au niveau de la naissance. La coupure se fait entre ce qui va devenir l’individu jeté dans le monde extérieur et ses enveloppes, qui sont des parties de lui-même[31]. »

Sur cette question de l’habitat et de la demeure, il est difficile de faire l’impasse sur le travail phénoménologique de Bachelard. Il permet le dépassement d’un géométrisme clos, où les tracés seraient des barrières imperméables qui ne s’entrecroisent pas. « Dans ce drame de la géométrie intime, où faut-il habiter[32] ? » se demande Bachelard. Il invite ainsi à se libérer de toute intuition définitive et postule une primitivité de l’être dans l’être-bien de la maison natale qui s’oppose à la conception de Lacan exposée ci-dessus. « La vie commence bien, elle commence enfermée, protégée, toute tiède dans le giron de la maison[33]. » Là où la phénoménologie de Bachelard postule que l’antique et mythique demeure du ventre maternel serait l’analogon d’un paradis perdu, la psychanalyse s’appuie ici sur des conceptions médicales pour indiquer le rapport de parasite qu’entretient le fœtus avec le corps maternel. Tout autant, elle souligne la dimension première de la perte d’un objet — les enveloppes embryonnaires.

L’expropriation du sujet devient par conséquent la condition nécessaire pour espérer habiter dans un ailleurs. « Bref, la révélation psychanalytique, c’est que l’homme est… un exclu[34] ! » Ce déracinement n’est pas sans évoquer Le malaise dans la culture de Freud, où il écrit : « La maison d’habitation [est] un substitut du ventre maternel, ce premier habitacle qui vraisemblablement est toujours resté objet de désirance […][35]. » À défaut d’habiter dans ce paradis fantasmé, le sujet est contraint à un rapport d’habitat au langage dans lequel il pourra s’aménager un habiter.

5. La patrie du sujet

Sa vie, le sujet la partage avec des petits autres ; semblables ou étrangers ; autres présents, parfois absents ; autres persécuteurs ou secourants ; autres jouisseurs ou étayants. Le sujet aura à y répondre dans l’entre-deux de la rencontre dont seul l’Autre, avec un grand A, pourra sembler garantir la frontière. Effectivement L’Autre est cette dimension limite à partir de laquelle le sujet aura à se constituer, à prendre appui, sans possibilité de la dépasser. Ce que nous accueillons avec la psychanalyse, c’est ce qui dérange, déloge le sujet de là où le moi se croyait souverain.

François Jullien dans L’écart et l’entre, propose que « Babel n’est pas une malédiction mais la chance de la pensée[36] ». Demandons-nous ce que représente structurellement le mythe de Babel. Babel c’est l’introduction du malentendu, de la discorde, de l’incompréhension généralisée. Mais ceci ne va pas sans l’autre face du mythe, à savoir l’ouverture et la pluralisation du langage comme ressource. Le pari de la psychanalyse trouve ses assises sur ce fait même en ne travaillant qu’avec la parole, en tant que chacun en est l’effet et non la cause. Actuellement, le discours de la science se pose en universel, réfutant l’existence d’une pluralité des manières d’être au monde, discours visant à réinstaurer cette langue d’avant Babel, cette langue pour tous, refoulant le malentendu. Aussi, ne se dessine-t-il pas, au travers des différents discours théoriques, une épreuve en acte de l’altérité ? De là, une question épistémologique se pose : l’élaboration théorique et conceptuelle est-elle à même de rendre compte de la notion d’altérité ? Quel que soit le champ disciplinaire par lequel se risque un abord du concept l’altérité, c’est de sa rencontre, de son épreuve quasi phénoménologique que nous avons à répondre. Du reste, il incombe à chacun de pouvoir en témoigner dans son style, qui n’est pas sans lien avec sa manière de faire avec la langue.

Pour conclure, nous avons tenté au travers de ce développement de dire et d’attraper ce quelque chose qui insiste en chacun, pouvant porter le sujet à vouloir en dire quelque chose, mais pas sans en passer par les mots. Se soumettre à cet exercice n’est pas sans comporter le risque que l’Autre scène, l’inconscient, se fraye un passage en disant ce qui n’était pas prévu. « Il y a aussi tout un champ où, de ce qui nous constitue, nous ne savons rien[37]. » La psychanalyse fait de l’altérité, de cette autre dimension avec laquelle nous cohabitons une vérité subjective, une altérité de jouissance, chacun avec ses façons de faire, ses façons de dire. La cure psychanalytique, avec le travail de l’analysant est une tentative d’extraction, de décollement de tout ce qui le maintient à la conformité de son assujettissement par des discours uniformisants refoulant l’altérité constitutive de chaque sujet. Mais le langage pris comme ressource découpe, délinéarise ; il crée de l’altérité et construit une intimité dans un même mouvement. Ainsi il s’entend pourquoi l’altérité ne se rencontre que du langage.

Finalement, ce dans quoi nous évoluons depuis l’exil primordial du corps maternel c’est le langage, entendu comme point de saisissement de ce qui peut faire asile. « Voilà le sujet freudien, exilé de la nature pour un habitat langagier[38]. » Ce déracinement premier peut-il nous permettre d’aborder les structures qui soutiennent les façons différentes d’être au langage ? Le langage étant toujours déjà là, il nous faut l’habiter ; l’habiter pour symboliser et dire la perte initiale et les suivantes. La question ne semble donc pas être géographique lorsqu’on se revendique du pays de la psychanalyse, mais davantage structurale en tant qu’elle conduit à observer les possibilités d’un ménagement significatif du sujet qui transforme son espace de vie en lieu habitable — à moins qu’il n’y soit étrangement parasite.

 

Bibliographie

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Biographie de l’auteur

Alexandre Faure est doctorant en psychopathologie clinique à l’Université Rennes 2.

 

[1]   Atiq Rahimi, La balade du calame, Paris, Éditions de L’Iconoclaste, 2015, p. 102.

[2] Oscar Bloch Walther von Wartburg, Dictionnaire étymologique de la langue française, Paris, Presses Universitaires de France, 2012, p. 46.

[3] Jacques Lacan, « Les clefs de la psychanalyse : Entretien avec Madeleine Chapsal », L’express, 31 mai 1957, n°310.

[4] Sigmund Freud, « Une difficulté de la psychanalyse », dans Œuvres complètes Volume XV, Paris, Presses Universitaires de France, 2012, p. 50.

[5] Op. cit.

[6] Jacques Lacan, Le Séminaire Livre III, Les psychoses (1955-1956), Transcription de Jacques-Alain Miller, Paris, Éditions du Seuil, 1981, p. 270.

[7] Colette Soler, L’inconscient qu’est-ce que c’est ?, Formations cliniques du Champ Lacanien, Collège Clinique de Paris, Année 2007-2008, p. 8.

[8] Sur ce point, voir Sigmund Freud, Le malaise dans la culture, Paris, Presses Universitaires de France, 2011, p. 108.

[9] Jacques Lacan, Le Séminaire Livre III, Les psychoses (1955-1956), Transcription de Jacques-Alain Miller, Paris, Éditions du Seuil, 1981, p. 286.

[10] Jacques Lacan, Le Séminaire Livre IX, L’identification (1961-1962), Inédit, Leçon du 15 novembre 1961.

[11] Jacques Lacan, Le Séminaire Livre III, op.cit., p. 284.

[12] Ibid., p. 276.

[13] Jacques Lacan, « Les clefs de la psychanalyse : Entretien avec Madeleine Chapsal », op. cit.

[14] Donald W. Winnicott, « L’angoisse associée à l’insécurité », dans De la pédiatrie à la psychanalyse, Paris, Éditions Payot, 1958, p. 200.

[15] Jacques Lacan, ibid.

[16] La traduction du terme unheimlich par « inquiétante étrangeté » se base sur celle généralement admise depuis Marie Bonaparte. Pour certains, elle a l’inconvénient d’introduire une notion supplémentaire, celle de l’étrangeté.

[17] Sigmund Freud, « L’inquiétant », dans Œuvres complètes Volume XV, Paris, Presses Universitaires de France, 2012, p. 183.

[18] Op. cit.

[19] Ibid., p. 158.

[20] Ibid., p. 152.

[21] Guillaume Le Blanc, Dedans, dehors : La condition d’étranger, Paris, Éditions du Seuil, coll. « La couleur des idées », 2010, p. 136.

[22] Sigmund Freud, « L’inquiétant », ibid., p. 175.

[23] Ibid., p.180.

[24] Sigmund Freud, « XIXe Leçon : Résistance et refoulement », dans Introduction à la psychanalyse, Paris, Petite Bibliothèque Payot, 1961, p. 275.

[25] Sigmund Freud, « L’inquiétant », op.cit., p.179-180.

[26] Ibid., p. 183.

[27] Martin Heidegger, « Bâtir, habiter, penser », dans Essais et conférences, Paris, Éditions Gallimard, 1958, p. 172.

[28] Op. cit., p. 173.

[29] Jacques Lacan, « Télévision », dans Autres écrits, Paris, Éditions du Seuil, 1966, p. 538.

[30] Martin Heidegger, op. cit., p. 172.

[31] Jacques Lacan, Le Séminaire Livre X, L’angoisse (1962-1963), Transcription de Jacques-Alain Miller, Paris, Éditions du Seuil, 2004, p. 268-269.

[32] Gaston Bachelard, La poétique de l’espace, Paris : Presses Universitaires de France, coll. « Quadrige », 2012, p. 196.

[33] Op. cit., p. 26.

[34] Marie-Jean Sauret, « L’exclusion », dans Psychanalyse et politique : huit questions de la psychanalyse au politique, Toulouse, Presses Universitaires du Mirail, 2000, p. 19.

[35] Sigmund Freud, Le malaise dans la culture, Paris, Presses Universitaires de France, 2011, p. 34.

[36] François Jullien, L’écart et l’entre, Leçon inaugurale de la chaire de l’altérité, Paris, Galilée, 2012, p. 41.

[37] Jacques Lacan, Le Séminaire Livre X, op.cit., p. 73.

[38] Marie-Jean Sauret, op. cit. p. 21.

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